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Végétales, étales

Eglise romane de Marnans (38)
2002
Acrylique sur toile

Une peinture juste, pas juste une peinture. Une peinture personnelle,...

… , qui ne doit rien aux alléluias de la mode ni aux versets satiriques rédigés par les experts officiels de l’art comptant pour demain.
Elle-même est toute étonnée de peindre, alors que ses enfants grandissent au rythme des icônes pixellisées et des installations copiées-collées. Qui plus est des fleurs, la bête noire du baromètre des tendances, le poil à gratter d’un monde qui perd ses racines.
A l’heure du « Qui veut gagner des millions », comment peut-on encore peindre des roses, maillon faible des temps modernes ?
Une réponse se tapit dans les bouquets d’incertitude d’Élisabeth Gilbert Dragic, dont l’obsession pour ce sujet en fait une plante rare, presque une espèce à protéger.
Ses feuillages en décrépitude n’ont rien des dentelles printanières qui font rougir le cœur loftomisé des filles en fleurs. Ils se contorsionnent, s’étalent, pareils à des insectes épinglés, carcasses végétales à la douleur tentaculaire.
Ses tulipes desséchées courbent l’échine : elle les a gardées chez elle, dans un vase, et voilà qu’elles rendent l’âme… Clic clac, une photo pour ralentir leur dernier soupir. Puis voilà des grands formats qui ne sont ni des natures mortes ni des buissons ardents. Mais des graines de solitude, fanées et foisonnantes, qu’elle a embaumées à sa façon, afin que le souvenir des choses inconsolables ne devienne ni trop grave ni trop lourd à porter.

En exposant dans l’église de Marnans, lieu de mémoire par excellence, la discrète artiste rompt une absence de cimaises qui dure depuis bien longtemps… Une fleur pour ceux qui croient en son travail.
DAVID S.TRAN

(texte du catalogue de l’exposition …Végétales, étales…, été 2002, dans l’église romane de Marnans, en Isère.)

 

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